Redwood National Park, première partie.

Tout le monde a déjà au moins une fois entendu parler des Séquoias géants, ces gigantesques arbres qui s’élancent à perte de vue vers le ciel. Nous en avons en France et en Europe qui prennent de belles proportions, mais pas au point d’atteindre la taille et l’âge de leurs aïeux californiens.

Le parc national des Redwoods se situe à environ 5h30 de route de Portland, au nord de la Californie. De bon matin, nous avons pris la route en direction du sud où nous espérions trouver de la fraîcheur. Depuis quatre jours nous supportions une canicule avec des journées à plus de 102 °F (39°C). Nous avons emprunté la I-5 en direction de Salem puis Corvallis, où l’on devait s’arrêter récupérer un peu de matériel de camping chez des amis. La route jusqu’à Salem nous a fait traverser des grandes plaines agricoles que nous avions perdu l’habitude de voir, principalement ensemencées de céréales. La région est une grande productrice de blé et de semence de graines de prairies.

Nous sommes habitués à voir les moissons autour de chez nous. Pourtant, en circulant et en voyant les moissonneuses à l’œuvre, quelque chose clochait par rapport à nos références habituelles: les machines récoltent le blé alors qu’il est déjà couché. Apparemment le blé est fauché avant pour qu’il sèche et la machine passe ensuite. Pour les curieux il y a un petit film de la récolte. https://fr.vecteezy.com/video/2571907-tracking-shot-of-combine-in-field-at-sunset-willamette-valley-oregon-usa

Le trajet nous a ensuite fait passer par la route I-84. La route traverse et serpente parmi un paysage de grosses collines et de forêts. A partir de Grants Pass nous avons bifurqué en direction de Crescent City, où nous avons traversé un paysage très sauvage. Cela nous a aussi permis de constater les dégâts des derniers incendies. Des hectares de forêts brûlées nous ont accompagnés pendant plusieurs kilomètres.

Tout à coup, juste après être passés de l’Oregon à la Californie, un rétrécissement de chaussée nous a obligé à nous arrêter devant ce qui ressemblait à un petit poste frontière. On pouvait y lire « contrôle agricole ». On nous demande si l’on transporte des fruits et des légumes frais. Nous avions simplement des bananes et des prunes, c’était bon, on pouvait passer. Si l’on avait eu des cerises et des raisins avec nous, on aurait peut-être dû les laisser au contrôle. En Californie ils ne rigolent pas avec ça. L’Etat étant un grand producteur de fruits et de légumes, il essaie de contrôler ce qui rentre pour réduire les risques de pathologies végétales.

A Crescent City nous avons atteint le Pacifique, il ne nous restait que quelques miles à parcourir pour atteindre notre hébergement. Nous avions un horaire un peu serré car notre hôte nous attendait pour l’accueil, mais nous n’avons pas pu résister à l’appel de l’océan. Il y avait des points de vue magnifiques sur la route, avec un soleil déclinant qui créait de magnifiques lumières. En continuant la route, les premiers Séquoias ont fait leur apparition. Malgré le brouillard qui avait envahi une partie de la zone que l’on traversait, on pouvait voir surgir de grosses masses sombres de chaque côté de la route. Très impressionnant !

Nous avons fini par arriver à notre destination au Gampling Woods, Waves and Wags à Klamath City chez Alysson. Nous y avions loué un garage dans lequel on pouvait dormir. On savait que le temps serait plus respirable le long de l’océan, mais on a tout de même été surpris par les 18-20°C qui nous ont accueilli et la fraîcheur de la nuit.

Le lendemain nous sommes partis en direction du parc national qui se situait à quelques kilomètres de notre lieu de résidence. Les premières exclamations d’émerveillement arrivèrent assez vite avec la présence des premiers Séquoias. Nous avions vu des Séquoias de taille respectable avec la visite de l’Hoyt Arboretum à Portland, mais sans comparaison aucune avec ce que découvrions alors. Il y en avait partout et l’on ne savait plus où donner de la tête. Avant de s’égarer complètement, nous avons décidé de nous rendre au « visitor center » et de demander conseil aux rangers.

Le ranger qui nous a accueilli nous a conseillé dans un premier temps d’aller admirer les « big trees » à proximité du centre. Ceci après un petit détour par une petite ville pour aller manger chez Mojo Pizza. Nous avons rencontré un pizzaïolo américain, formé en Italie et qui adore la France. Repus, nous sommes repartis vers le parc pour voir ces fameux géants.

La publicité n’était pas mensongère, les arbres sont effectivement géants. On pensait avoir vu le plus gros arbre du parc, mais non, en suivant un panneau on pouvait aller voir un autre arbre encore plus gros. Vraiment très impressionnant. C’est très difficile de retranscrire les proportions avec des mots tellement cela dépasse nos références habituelles. Pour donner une image, pour faire le tour des plus gros spécimens il faut être une douzaine de personnes. La hauteur aussi est très impressionnante quand on voit les chiffres, bien que difficile aussi à appréhender quand on est au pied des arbres. On sent bien qu’ils sont très hauts mais on est bien incapable de se prononcer sur une hauteur. Il faut être sur un point de vue qui donne une comparaison avec d’autres arbres pour voir que les Séquoias sont vraiment très hauts. Nos déplacements sur les routes nous ont offert ces points de vue par endroits.

L’arbre le plus haut du monde a été découvert récemment par le chercheur Chris Atkins et le naturaliste Michael Taylor en 2006. Il se nomme Hyperion et mesure 116 m de hauteur. Il se trouve dans un coin reculé du parc et gardé secret pour éviter l’afflux de touristes et la dégradation de l’écosystème.

Quand on parle du parc national des Redwoods, on s’imagine évidemment les arbres et l’on montre surtout les troncs géants des Séquoias noyés dans le brouillard. Pourtant, ce qui fait la magie de ce lieu ne réside pas seulement dans la présence de ces arbres. En effet, tout ce qui pousse en-dessous, tout ce qui compose le sous-bois contribue à rendre inoubliables les chemins empruntés. Un grand calme émane de ces forêts, on s’y sent bien.

La particularité climatique de cette partie de la Californie et de la côte nord-ouest américaine est générée par le contraste de température de l’océan Pacifique et du continent. Quand on parle de Californie, on a souvent l’image du sud de l’Etat avec Los Angeles, San Francisco, les vagues, les surfers, la baignade. Dans le nord, on peut tout de suite oublier ça. Les masses d’air océaniques viennent buter contre le relief de la côte et se condensent au contact de l’air plus doux. Le résultat se traduit par des masses de brumes qui englobent toute la forêt. C’est en partie grâce à cela que les Séquoias sont aussi grands dans cette partie du globe. Les arbres ont la capacité de capter cette eau et de l’utiliser pour leur croissance.

De l’Europe on a aussi tendance à associer la Californie aux incendies dévastateurs de forêt. C’est une réalité et cette tendance ne va pas en s’arrangeant avec l’évolution des changements climatiques. L’année dernière certains incendies sont venus lécher les limites du parc national, et selon les informations, ont menacé les géants. Il s’agit là d’une contrevérité, car d’autres particularités morphologiques et physiologiques permettent aux séquoias de survivre aux incendies, mais surtout ils en sont en partie dépendants pour se reproduire (mais il ne faut pas que les incendies soient trop fréquents non plus). Les vieux sujets ont une écorce très épaisse et spongieuse qui les isole des flammes. Ensuite, sous la chaleur, les cônes portés par les arbres s’ouvrent et libèrent leurs graines. Les autres essences qui composent la forêt et ne sont pas aussi bien équipées en protection, brûlent et laissent la place libre aux graines de séquoias qui ont besoin de lumière pour germer. En marchant parmi les arbres il est très facile d’observer ces traces de feux anciens.

Dans nos différents échanges pour décrire ces lieux, on est souvent restés à court de mots. Ce qui est revenu régulièrement, c’est le fait que la vie et la mort ne font qu’un, sans opposition. Ce qui est très agréable, et c’est vrai pour toutes les forêts que nous avons visité jusqu’à présent, c’est la présence massive de bois mort. Les arbres qui tombent sont laissés au sol. Les interventions consistent juste à dégager les parties qui empiètent sur les sentiers. La dégradation du bois est assurée par les champignons et offre à de nombreuses plantes un substrat de croissance. On a pu observer des troncs géants de Séquoias couchés et complètement colonisés par les Airelles (Vacinium ovatum), les Fougères (Polystichum munitum) et les Heuchères (Heuchera micranta).

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