Après cette semaine urbaine, nous avons retrouvé notre chaleureux petit cottage, et la verdure de la campagne du Massachusetts. La petite nouveauté, c’est que nous sommes rentrés équipés d’une voiture. Nous sommes maintenant autonomes. A peine rentrés qu’il nous a fallu reprendre la route vers l’Etat de New York. Direction les Catskill moutains, vers l’ouest, où nous avions rendez-vous avec Carolyn Summers à Liberty. Carolyn Summers est paysagiste conceptrice, auteure et professeure. Elle a fait toute sa carrière dans des administrations environnementales américaines où elle était en charge des plans de restauration et protection des espaces naturels. Nous avons trouvé son contact par l’intermédiaire de l’Ecological Landscape Alliance. C’est une association qui regroupe des jardiniers, paysagistes, architectes, designers, pépiniéristes engagés dans des pratiques respectueuses du vivant.
Pour la plupart, ils travaillent sur des projets de création, restauration et entretien de parcs et jardins. Leur principal point commun c’est de faire appel aux plantes locales dans leurs projets. C’est le sujet le plus intéressant que nous avons pu observer dans la région. Carolyn Summers a poussé la réflexion assez loin dans l’usage des ces plantes. Elle en a même écrit un guide avec sa fille, qui a repris les activités de conception. Avant d’entrer dans le jardin de Carolyn, nous avons dû prendre la route.
Ouvrons une petite parenthèse sur la conduite aux États-Unis car c’est ce qu’on appelle une expérience.
Fraîchement équipés de la veille de notre Toyota Camra, nous sommes partis prudemment vers notre destination. C’était la première conduite aux Etats-Unis. On a tous l’image de ces gigantesques échangeurs à 2×5 voies remplis de voitures. C’est avec quelques appréhensions que nous nous sommes engagés sur ces routes géantes. On est plutôt partisans de l’orientation avec des cartes, mais là il faut avouer que le gps nous a vraiment aidés pour rouler sereinement. Manue, notre hôte, nous avait un peu briefé sur les règles de conduite. Le premier fait perturbant, ce sont les feux qui se trouvent de l’autre côté de la voie où l’on doit s’arrêter. Comme il y a des feux quasiment à chaque carrefour on a vite pris le pli. Une chose étonnante, c’est le fait de pouvoir, dans certains cas, passer au rouge lorsque l’on tourne à droite. Il faut être confiant, dans le doute on ne bouge pas. Globalement les Américains sont assez cools au volant, ça ne roule pas très vite, et la circulation est assez fluide. Surtout ne pas dépasser les limites de vitesse, sinon la police peut surgir derrière vous tout gyrophare clignotant et vous demander de vous ranger sur le bas-côté. C’est comme à la douane, surtout éviter la petite blague! Autre point important, c’est le croisement avec des véhicules de secours. Ils sont bien entendu prioritaires mais il ne faut pas juste les laisser passer, on doit s’arrêter et attendre qu’ils soient passés. Il y a quelques rares ronds-points, qui se prennent un peu au petit bonheur. Enfin la dernière chose déstabilisante en tant que conducteur français, c’est les dépassements possibles de tous les côtés. On s’y habitue mais c’est quand même perturbant, notamment sur l’autoroute, quand les camions (vraiment énormes!), qui sont autorisés à rouler à la même vitesse que les voitures, vous dépassent par la droite.
Nous avions 5 heures de route jusqu’à notre destination, dont 4 heures sur l’autoroute, l’habitude fut rapidement prise. A la différence de la France, les autoroutes sont publiques. Elles ne coûtent pas très cher et n’ont rien à voir avec nos autoroutes privées toujours bien entretenues.
L’entretien, ici, est à la charge de l’Etat. Vous pouvez, si vous ne savez pas quoi faire, devenir volontaire et venir entretenir les bords des autoroutes. Au programme, nettoyage des déchets, des graffitis et arrachage des « mauvaises herbes ». Sympa comme programme de camp d’été pour les ados !
Fin de la parenthèse, revenons à notre sujet botanique du jour, la visite guidée du Flying trillium. Les trilliums sont de jolies plantes à fleurs de la région. Plusieurs espèces poussent dans le jardin et en sont devenues l’emblème. Carolyn nous a accueillis chaleureusement, et nous avons aussitôt débuté la visite. Nous avons eu de la chance, car quelques minutes plus tôt nous étions coincés dans la voiture sous une énorme averse orageuse.
Notre guide nous a emmenés au départ de la visite, au pied d’une belle pergola ingénieusement utilisée comme clôture contre les daims. On ne vous l’a pas encore dit, mais ces charmants petits ongulés sont un fléau ici. Ils sont en surpopulation et génèrent beaucoup de dégâts sur les jeunes plantes. Qui veut un jardin dans la région doit d’abord se clôturer contre les daims.
Poursuivons la visite. Carolyn nous fait passer devant plusieurs massifs, composés uniquement de plantes sauvages locales. Elle a su marier ces plantes avec beaucoup de subtilité et de finesse. Le résultat est très esthétique. Les massifs semblent avoir toujours été présents et s’intègrent parfaitement dans le reste du paysage. La visite continue, et une éclaircie est venue illuminer les montagnes des Catskills autour. Un magnifique ciel plombé qui est venu contraster avec les nuances de verts du jardin. En cheminant dans les différents endroits du jardin nous avons pu admirer toutes les créations de Carolyn, ses collections de conifères nains et son verger. La visite fut efficace. Nous sommes repartis, une heure et demie plus tard, inspirés par le jardin et le travail minutieux de composition que la jardinière s’attèle à mettre en œuvre.
Perdus au milieu des montagnes il nous fallait maintenant trouver notre chemin pour rejoindre notre hôtel pour la nuit.
C’est à Liberty que nous avons trouvé un des rares hôtels disponibles. Le Days Inn by Wyndham, situé entre l’hôtel et le motel, nous a ouvert ses portes. Le soir nous sommes allés manger juste à côté dans un diner local. Rentrés avec certains a priori face au décor un peu kitch, nous avons été super bien accueillis. On ne sait pas si c’était parce que nous représentions un changement dans leur clientèle habituelle ou si c’était parce que nous étions Français, mais la serveuse et la gérante du restaurant se sont montrées très généreuses. On a commandé chacun un plat. La proportion était parfaite, juste ce qu’il fallait pour un soir. Jusqu’à présent, les quelques restaurants où nous étions allés manger nous avaient servi des portions américaines: un plat aurait pu suffire pour deux.
On ne sait pas ce qu’il s’est passé mais la serveuse est revenue avec une autre portion de lasagne, estimant que Manu n’avait pas eu assez de quantité et voulant se faire pardonner. On était désolés, impossible d’avaler autre chose. Elle nous a proposé de l’emporter, comme cela se fait beaucoup ici, mais nous n’avions rien pour le stocker correctement ni pour le manger le lendemain. La gérante n’en est pas resté là et nous a apporté une grosse part de gâteau au chocolat qu’elle a sorti de sa vitrine. Impossible de refuser, nous sommes donc repartis avec notre doggy bag et notre part de gâteau.
Le lendemain matin, nous avons pris notre petit déj dans la salle de l’hôtel, en compagnie de deux grands écrans dont l’un était branché sur Fox news. On s’estime assez ouverts et curieux pour discuter et aller au-delà des a priori, mais la, c’était trop.
Il nous fallait de la nature pour effacer cette mauvaise sensation. En regardant sur la carte, nous avons trouvé un sentier de ballade dans une petite forêt. Le sentier était agréable sans être exceptionnel, mais nous a offert un beau point de vue sur les Catskill mountains et une belle rencontre.
A différents endroits de la ballade, nous avons croisé un homme qui nous a adressé la parole à plusieurs reprises. Très sympa et curieux de savoir d’où nous venions avec notre accent, il nous a demandé si l’on savait ce qu’était ce grand rectangle vert que l’on pouvait apercevoir au milieu des bois.
Évidemment on n’en avait pas la moindre idée. C’était le mythique lieu où le festival de Woodstock a eu lieu en 1969. On était à 15 min de voiture sans le savoir. On devait repartir vers Holliston, mais on s’est dit que l’on ne pouvait pas rater ça. On a donc fait ce petit détour et nous avons pu voir ce site que des millions de personnes connaissent. C’est une grande prairie entourée d’arbres. On se demande comment 450 000 personnes ont pu se tasser sur cette surface. Aujourd’hui, il y reste une sculpture en mémoire de l’événement et un espace muséographique. À en juger par la taille des parkings, le site est encore bien fréquenté et la commémoration annuelle doit rassembler un paquet de nostalgiques de l’époque.
Très contents de notre petit crochet imprévu, nous avons avalé notre gâteau de la veille et repris la route pour Holliston, où nous étions attendus le soir pour la fête surprise du diplôme de Margot, fille aînée de nos hôtes.