Central Park

Nous avions prévu de visiter ce parc, pour son côté mythique, ses dimensions exceptionnelles (plus grand parc urbain des Etats-Unis) et pour voir comment ce parc s’adaptait aux changements climatiques en cours.

Encore cette sensation de familiarité, il nous faudra quelques jours pour nous approprier le décor.

Nous rentrons dans le parc pour la première fois par le sud-est, près du zoo. C’est le côté plus touristique : on nous propose une promenade en calèche, il y a plein de vendeurs de casquettes et autres souvenirs. Ce qui frappe n’est pas le parc en lui-même, nous verrons vite que ce n’est pas un parc conservatoire mais bien un poumon de verdure et d’espace, indispensable pour les habitants. Ici, pas d’espèce rare d’azalées, mais des grandes pelouses qui permettent aux enfants de se défouler, des allées sans voiture pour les joggeurs (très nombreux!), et un endroit où promener les chiens, également très nombreux. Des grands arbres partout, qui apportent une réelle sensation de nature et de bien-être. Le parc est d’ailleurs habité par beaucoup d’écureuils et de chipmunks (qui ne sont pas que des créatures de dessin animé), nous croiserons même un raton laveur ! C’est également un lieu de passage pour les oiseaux migrateurs.

Ce qui est frappant par rapport à d’autres parcs urbains, c’est la présence de si grands immeubles tout autour qui forment un cadre.

Central Park sera notre fil rouge toute cette semaine, d’une part car il faut plusieurs jours pour le découvrir, et encore de manière superficielle, et aussi car nous avions besoin de notre dose quotidienne de chlorophylle et d’espace.

Nous avons d’ailleurs été très heureux de nous y plonger après être passés par Times Square, épicentre touristique, mais qui a plutôt eu pour effet de nous faire fuir par l’agressivité des écrans, du bruit et la sensation oppressante de la foule.

Central Park est immense (340 ha) et nous l’aborderons par plusieurs entrées. Plus on va au nord, plus il est facile de trouver des chemins de traverse et plus le parc a l’air d’appartenir aux New-yorkais. Encore plus au nord, près d’un grand lac, le Jacqueline Kennedy Onassis Reservoir, on arrive dans une zone vraiment calme, ce qui est assez étonnant en plein Manhattan. Et ce qui est plus étonnant encore, c’est un parc dans le parc, North Woods, qui est incroyablement calme. On y fait l’expérience d’un silence (presque) complet. C’est un refuge ornithologique, on en oublie où on est. C’est d’ailleurs là que l’on croise des personnes venues se poser pour lire ou simplement être au calme.

En arrivant dans le Massachusetts, notre séjour à Holliston nous a donné un autre fil rouge à suivre, qui est venu compléter notre projet. Si les initiatives pour la résilience et l’adaptation ne sont pas majoritaires dans la région, nous avons pu nous plonger dans l’histoire des parcs urbains américains en suivant les traces de Frederick Law Olmsted. Avec son associé Calvert Vaux ils ont remporté le concours pour la réalisation de Central Park. Ce qui nous a mis sur ses traces, c’est le lien qui l’a uni avec l’ancien occupant de notre cottage et de la ferme que nos hôtes ont acquise il y a quelques années. FLO (Frederick Law Olmsted) a voyagé dans tous les Etats-Unis et une partie du monde . Ces voyages lui ont permis de penser des théories sur le rapport entre l’homme et le végétal. Jusqu’à en tirer une conclusion, toujours d’actualité, que les citoyens d’une ville devaient avoir accès à des espaces de nature et de vie, pour leur bien-être physique et mental ainsi que pour la démocratie américaine. Rien que ça ! Il a dit cela à la fin du 19e siècle. Plus d’un siècle plus tard ce sont toujours nos préoccupations. FLO et Vaux ont créé une des premières agences de paysagiste concepteur des Etats-Unis. Tout au long de la vie de cette agence qui a vu se succéder les héritiers de FLO, plus de 6000 projets ont vu le jour.

Parmi ces projets, FLO a porté une réflexion sur le végétal et notamment sur l’acclimatation de végétaux issus d’autres régions. Les parcs et jardins d’acclimatation étaient courants et réunissaient les plantes que les explorateurs ramenaient de leurs expéditions. FLO a mené son projet sous la forme d’un arboretum à Boston. Nous le détaillerons dans un autre article.

Revenons donc à Central Park. Après leur victoire au concours, l’agence de FLO et Vaux a engagé la construction du parc.

Raconter toute l’histoire de la construction serait trop long et un peu barbant dans un seul article, arrêtons-nous simplement sur quelques chiffres clés qui permettent d’entrevoir le travail colossal que cela a représenté et la dimension hors norme de ce parc.

Les travaux se sont étalés sur une quinzaine d’années. Il a fallu évacuer des centaines de milliers de m³ de terre et rapporter 18 500 m³ de substrat plus fertile pour permettre à la palette végétale prévue par les concepteurs de s’adapter au sol pauvre du parc. Selon Wikipedia, les travaux de terrassement ont nécessité plus de poudre que la bataille de Gettysburg pendant la guerre civile, connue pour avoir été la bataille la plus meurtrière.

Le parc compte aujourd’hui 20 000 arbres. 235 espèces d’oiseaux ont pu être observé sur une année et 10 espèces de mammifères.

Cette diversité provient du fait que le parc offre des habitats variés. Des grandes pelouses ponctuées d’arbres de hauts jets alternent avec des bassins et étangs entourés de bois jusqu’à une petite rivière en sous-bois.

L’entretien de ces différentes zones est gradué en fonction des usages. Il y a de grandes parties de pelouse qui sont tondues pour répondre à la nécessité des usagers d’accéder à ces espaces. Les massifs que nous avons pu observer sont principalement composés de plantes sauvages. Ce choix est judicieux, car ils ne demandent aucun suivi, sans doute juste un débroussaillage en fin d’été.

Nous avons pu arpenter différents endroits et percevoir que le ressenti était différent en fonction de la végétation. On vous le disait, cette ville nous semblait familière par le flot d’images qui nous ont accompagnées pendant notre enfance et qui nous inondent encore parfois dans le cinéma américain. Mais c’est le côté idyllique et publicitaire que l’on voit. C’est assez rare de voir des images des rues en travaux (des échafaudages dans quasiment toutes les rues), des embouteillages monstres, des hélicoptères et des avions. Tout ce trafic génère un bruit assourdissant. Central Park était donc le refuge idéal pour s’éloigner de ce brouhaha. Les endroits où le son est le moins perceptible sont les zones boisées sauvages (North Woods) qui offrent la plus grande densité végétale et donc la plus grande efficacité de réduction du bruit.

Du fait de sa grandeur, nous n’avons pas pu rentrer dans tous les détails du parc. Il faudrait quasiment y consacrer une semaine pour en faire le tour et passer dans chaque endroit. Pour faire le lien avec notre thématique, on s’interroge sur l’évolution du patrimoine arboré. Les 20 000 arbres qui le composent sont principalement des espèces locales issues de la côte est américaine. Les changements en cours risquent d’affaiblir une partie des espèces actuelles (chêne, tulipier, liquidambar, érable…). Comment ces essences vont-elles s’adapter, le peuvent-elles simplement ? Ces questions restent pour le moment sans réponse. Les arbres n’ont pas l’air de souffrir. Nous n’avons pas vu beaucoup de nouvelles plantations dans les secteurs que nous avons traversés. Nous n’avons pas réussi non plus à rencontrer de personnes du service d’entretien pour les questionner sur une éventuelle réflexion pour le renouvellement des espèces. Le site de Central Park, « central parc conservancy » (lien en bas de l’article), mentionne des travaux de restaurations et d’amélioration. À suivre…

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